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HELLFEST | Clisson, France
18-20.06.2010
Chez Transit, on aime les festivals. Ceux qui puent la bière et la pisse, fourguent cent cinquante groupes en trois jours et se font un devoir d’empêcher tout sommeil. On aime rentrer morts, alcooliques, constipés et émerveillés. Parce que le metal, c’est avant tout ça, une déferlante de passion. Ces trois dernières années, notre préférence pour le Hellfest s’est confirmée. De la bière et du magret de canard, un Leclerc pour les lingettes démaquillantes, une programmation bulldozer, de quoi rendre un hommage tonitruant aux dieux du heavy metal. Mais un festival se mérite et le graal n’est atteignable qu’après un certain nombre d’épreuves. Chez soi, il y a d'abord la préparation du sac – oublier le PQ constitue une grave atteinte aux droits de l’homme –, puis le trajet, des heures pénibles en bus avec pauses pipi, le plantage de tente sans marteau et enfin, les premières émotions.
Vendredi 18 juin
La rumeur se sent de loin, déjà depuis le village de Clisson à quelques kilomètres. Plus on se rapproche, plus la chose se précise. Puis d’un instant à l’autre, la plaine du Val de Moine s'offre à nos yeux : deux tentes monstrueuses, du monde à perte de vue, du noir... et du son, puissant, jubilatoire. Celui de KMFDM en l'occurrence, formation hybride mixant metal et electro. Un beat synthétique donne le ton, martelant et frénétique. La foule est paisible, qui boit une énième bière, qui se nourrit sur un des nombreux stands ou récupère d'une première nuit douloureuse. Une communauté parfaitement à l'aise, qui évolue dans son milieu naturel. Bon enfant, le Hellfest l'est jusque devant la scène, où les plus motivés s'adonnent plus tard au circle pit. La chanteuse de Walls Of Jericho, une rousse brûlante à l'aise dans le registre metalcore, n'a pas besoin de se répéter pour que les premiers rangs se lancent dans la danse. Ça tourne, ça virevolte dans tous les sens, ça exulte... Le show des Américains n'a pas convaincu que les adeptes du genre : contrairement aux formations old-school qui peinent ce jour-là à maintenir la cadence. Une des qualités du Hellfest réside dans sa programmation, exigeante et pointue. Le festival se fait apôtre de la diversité, proposant ici le heavy metal de Primal Fear, là le death ultra-technique de Necrophagist. Les genres marginaux ne sont pas en reste et nombreux sont les amateurs à déserter les shows mollachus des vétérans pour s’aventurer en terres inconnues. Ce premier soir, la Suisse est à l’honneur sous la Terrorizer Tent consacrée aux 'styles annexes' avec les Lausannois de Monkey3, les potes de Sybreed qui foutent une sacrée ambiance et les Young Gods. On ne parlera pas de jeunes dieux, mais d’une pute. Elle ondule, lascive et frétillante, affichant un sourire insolent. Le rock électrifié des Helvètes fait dans la densité humide, guitares hantées et grincements. Un excellent concert, même s’il fut écourté pour cause de problèmes de son. Un des temps forts de cette édition fut le concert de Godflesh, groupe mythique de metal industriel reformé pour l'occasion et pour un unique concert en Europe. Handicapé par de nombreux problèmes techniques, le groupe s’est enlisé dans un line-check d'une demi-heure avant d'entamer un show parfois au son poussif, parfois aux guitares absentes. Malgré tout, la performance des Anglais fut mémorable : du bruit rouillé, sec et tranchant. Une recette parfaitement maîtrisée, qui a fait le succès du groupe. 23h00, soleil juste couché, l’air est frais, suffisamment chaud pour être confortablement assis dans l’herbe. Le grand moment approche, celui que les amateurs de curiosités attendent depuis des mois : le concert d’Ulver. Groupe exceptionnel s’il en est, la formation norvégienne est partie d’un black metal old-school pour évoluer en quinze ans vers un trip hop assombri aux relents jazz et expérimentaux. Sur scène, point trace de black metal. Le groupe a définitivement tourné la page et l’heure est aux sonorités recueillies. Troublante, la musique des Norvégiens l’est sans conteste. Crépusculaire, bouleversante. En arrière-fond, des projections subversives (sexe, suicide, …) renforcent la densité du spectacle. Seul point noir, des basses souvent trop présentes qui prennent le dessus sur les autres instruments, notamment la voix. Un groupe à voir et revoir, peut-être dans un cadre plus intimiste.
Samedi 19 juin
Impossible de rater les légendaires Kalisia en cette fin de matinée. Ce groupe français de metal prog barré qui n'a sorti qu'un mythique EP en 1995 et qui est revenu l'an passé avec un magnifique concept album dont la moitié sera jouée sous la Rock Hard Tent. À revoir en tête d'affiche. Nos amis de Tamtrum foutent le bordel sur la Mainstage 2 avec leur electro indus qui tabasse ce qui somme toute, n'est pas plus mal pour nous réveiller. Après avoir pris notre pied en revoyant les excellents Pretty Maids qui remplacent Ratt au pied levé, rendez-vous avec les Canadiens d'Anvil qui ont évidemment été invités à participer à la fête (buzz autour de leur film oblige). En espérant ne pas trop se faire d'ennemis, on peut comprendre que le succès ne soit pas venu très rapidement pour ce groupe qui multiplie les clichés tout en offrant un heavy metal peu original et auquel manque cruellement une guitare rythmique. Voilà un bout de temps que Warrel Dane et son équipage de Nevermore n'avaient pas pointé le bout de leur nez en Europe. Leur nouvel opus 'The Obsidian Conspiracy' est un vrai joyau et possède des titres taillés pour le live 'Your Poison Throne' ou 'Emptiness Unobstructed' sans oublier les classiques tels que 'Ennemies Of Reality', 'The Heart Collector'. Un concert sublime. Après un rapide passage sur la légende Twisted Sister et ses tubes 'We're Not Gonna Take It', 'I Wanna Rock' et 'Burn In Hell' direction la Rock Hard Tent pour My Dying Bride. Une prestation bien meilleure que celle donnée il y a deux ans en plein soleil. 'The Cry Of Mankind' clôt le concert juste à temps pour foncer voir Alice Cooper et son show grand-guignolesque. Une prestation en demi-teinte avec un 'Poison' massacré et des artifices de cirque un peu trop kitsch à notre goût. Une bonne raison de finir la soirée au son des Fields Of The Nephilim qui envoûtent leur public avec leur goth rock planant. De quoi passer une nuit magique et être en forme pour le dernier jour.
Dimanche 20 juin
Après s'être gentiment réveillé sur les sons pagan / viking metal d'Eluveitie et d'Ensiferum, place au death sataniste de Behemoth. Sans être spécialement fan du style, rien à dire ce groupe est carré et envoie la sauce. Après une escapade du côté de la tente pour (re)voir Katatonia (déjà chroniqué deux fois cette année dans Transit), retour aux mainstages pour ce qui restera un des concerts phares de cette édition : Devin Townsend ! Le génie canadien nous fait un mix de ses multiples projets dont 'Addicted', 'Physicist' et le barré 'Ziltoid'. Le tout avec un son et une présence scénique hallucinante. Weedeater, c'est du lourd, du gros qui suinte. Apparenté à la grande famille sludge du sud des States, le groupe ne trompe pas son monde : on fume de l’herbe et on vous envoie nos délires graisseux dans la face, rien d’autre. Mur de basses, guitares plombées et voix de charogne, le groove des Américains est du genre salissant. Alors qu'Exodus exécute son live special Hellfest (l'album 'Bonded By Blood' joué intégralement), nous allons reprendre une dose d'egyptian death sous la RH Tent avec Nile qui comme à son habitude détruit tout sur son passage et invite même ses potes de Behemoth à le rejoindre à la fin du concert. Sous la Terrorizer Tent, les malades mentaux de The Dillinger Escape Plan sautent dans tous les sens comme à leur habitude aux rythmes déstructurés de leur metal hybride. Toujours mieux qu'un Slayer un peu en bout de course. Kiss, on aime ou on n’aime pas mais impossible de rester indifférent devant ce spectacle de malade. Plates-formes, pyrotechnie, écrans et lettres lumineuses radioactives à ne plus savoir qu'en faire. Sans oublier le déluge de hits de 'Deuce' à 'I Was Made For Loving You' en passant par 'Black Diamond', 'Detroit Rock City' et bien d'autres. Décidément, Ben, Yoan et leur équipe nous ont offert une fois de plus ce qu'on peut sans problème appeler : 'le meilleur festival metal de 2010'. Vivement l'année prochaine en espérant que Christine Boutin s'occupe à nouveau de la promo. [PsiloSyn & Géraldine]
mis en ligne le : 31.10.10 par indy
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