INTERVIEW - Avantasia (2010)

Avantasia, le projet solo du leader d'Edguy, Tobias Sammet, est de retour ! Avec non pas un mais deux albums : ‘The Wicked Symphony’ et ‘Angel Of Babylon’. Une nouvelle fois parsemés d'invités tous plus prestigieux les uns que les autres (notamment le chanteur de Scorpions, Klaus Meine), ces deux disques conceptuels forment la suite et la conclusion de l'histoire débutée dans ‘The Scarecrow’, paru en 2008. Entretien avec ce Tobias toujours très sympathique.



- Les deux nouveaux albums d'Avantasia viennent juste de sortir il y a quelques jours. Quel est ton sentiment à ce propos ?

Eh bien tu sais, en fait je ne peux plus faire grand-chose à ce stade-là... (rires)

- Mais est-ce que tu as déjà quelques bons retours, de la part de la presse et des fans ?

En fait j'essaie de ne pas trop regarder, car quoi que tu fasses il y aura toujours des bonnes critiques et des mauvaises. Cela dit, je peux te dire que les premières réactions sont vraiment excellentes, c'en est presque effrayant (rires). J'ai aussi eu des réactions de fans sur mon site Internet, et on dirait que les gens sont plutôt ravis. On me demande souvent si je suis nerveux pour la sortie d'un album, mais tu sais, j'étais plus impliqué lorsque je le produisais ! Maintenant, je ne suis plus le pilote, je suis juste un passager. L'avion a décollé et je ne le pilote plus, c'est le destin. Je ne peux plus rien changer, ce qui est plutôt bien. Là j'espère juste être numéro un (rires) !

- En parlant de la presse, j'aime beaucoup la citation de Frank Zappa que tu as mise sur la page d'accueil de ton site, la définition du journalisme de rock : des gens incapables d'écrire, interrogeant des gens incapables de penser, dans le but de faire des articles pour des gens incapables de lire...

Frank Zappa est un dieu. Il a un sens de l'humour si subtil, c'est génial ! Ce gars se foutait de la gueule de la presse, mais il se foutait également de la gueule des fans, et aussi de lui-même. Se rire de tout, je trouve ça vraiment excellent.

- Et quelle est ta propre opinion sur la presse musicale ?

Tu sais, il y a différentes sortes de journalistes... Dans le passé, certains m'ont fait péter un plomb, mais je suis maintenant vacciné (rires). Si tu aimes la musique, c'est vraiment génial de choisir un groupe que tu apprécies et d'écrire quelque chose à son propos ou de faire une interview. Même si c'est pour poser des questions critiques, pas de souci ! Mais j'ai le sentiment que parfois certains journalistes, – et pas que des journalistes d'ailleurs, c'est plutôt un trait de caractère – s'occupent uniquement de choses qu'ils n'aiment pas ; ils attendent juste de pouvoir casser un groupe ou une personne, en écrivant des choses vraiment méchantes. C'est cela que je déteste vraiment : détruire juste dans le but d'avoir cinq minutes d'attention. Et je ne trouve pas correct d'utiliser mon travail ou de dire du mal de moi pour attirer l'attention et se faire de l'argent sur mon dos. Mais d’une façon générale, je n'ai rien contre la presse musicale, car au final nous sommes tous les mêmes. Je suis un fan de musique, j'écoute des albums et toi aussi tu es un fan de musique qui écoute des albums.

- Et maintenant la question à laquelle tu as probablement dû déjà répondre maintes fois : pourquoi deux albums ?

Car il y avait trop de chansons pour un seul album (rires) ! En fait c'est assez simple, tu sais : à l'époque de ‘The Scarecrow’, nous avions déjà assez de titres pour faire deux albums. Mais nous savions que nous ne voulions pas faire un album en deux parties. Nous avons donc fini la production des premières onze chansons pour finir ‘The Scarecrow’ et nous avons mis le reste du matériel de côté. En 2009, nous sommes retournés au travail pour finir ces neuf ou dix titres qui avaient été mis en attente. Des compositions qui n'en étaient pas pour autant moins bonnes ! Mais j'avais également eu d'autres idées entre-temps... Je me suis dit que j'allais en faire trois ou quatre de plus, puis cinq ou six, puis soudainement je me suis retrouvé avec vingt-deux pistes. Nous avions donc deux options : les sortir en tant que double album ou alors en tant que deux albums individuels dans la boîte d'un double album. Et je voulais vraiment leur donner une identité individuelle, car je n'aime pas la réputation de la plupart des doubles albums. Pour moi, un double album c'est toujours quelque chose comme quatorze chansons, trois interludes, et des passages de narration avec beaucoup d'instrumentaux et de drôles de sons (rires), tu sais ce genre de choses. Je ne voulais vraiment pas faire ça.

- De quelle façon travailles-tu pour composer ?

Je commence toujours avec l'aspect musical. Cela peut être un refrain, une mélodie, ou un riff, juste quelque chose sur lequel se baser pour la suite. Je regroupe ensuite toutes mes idées. J'analyse, je sens l'humeur de la musique et de la chanson, afin de trouver des connotations ou des associations avec certains passages de l'histoire. Je pense qu'une bonne partie de ce travail se fait inconsciemment, mais je commence vraiment toujours avec la musique.

- Est-ce que quand tu commences à composer, tu sais depuis le début si cela va être un titre d'Avantasia ou d'Edguy ?

Tu sais, je ne veux vraiment pas devoir me concentrer sur trop de choses en même temps. Donc quoi que j'aie sur la table, je l'utilise pour le projet en cours. Si je travaille sur un album d'Edguy, ce sera donc une chanson d'Edguy. J'essaie toujours d'écrire la meilleure mélodie, le riff le plus puissant. Cela n'aurait vraiment pas de sens de commencer à trier du matériel, genre ‘cela va à gauche, cela va à droite’. C'est trop d'organisation ! On ne devrait jamais penser à la deuxième étape avant la première. Mais c'est effectivement arrivé qu'il y ait un ‘incident’ : pour le dernier album d'Edguy, ‘Tinnitus Sanctus’, nous avons pris le titre ‘9-2-9’ qui avait été composé à la base pour Avantasia mais qui n'avait pas encore de paroles. J'avais juste le sentiment que c'était un titre génial qui pouvait rendre cet album encore meilleur. Voilà donc comment une chanson d'Avantasia est devenue une chanson d'Edguy !

- Concernant tous ces fameux invités, était-ce dur de les convaincre ou il t'a suffi de les appeler et leur poser la question pour qu'ils te répondent tout de suite par l'affirmative ?

Eh bien cela s'est presque exactement passé comme ça. Je n'ai jamais vraiment eu besoin de convaincre qui que ce soit. Enfin oui, j'ai essayé de convaincre Russel Allen en lui disant : ‘Ok, tu vois, sur cet album on a notamment Klaus Meine et Ripper Owens, sur le dernier j'ai eu Alice Cooper, Bruce Kulick et Eric Singer. Est-ce que tu as envie d'être aussi sur l'album ?’ Et il a dit : ‘Oui, oui, oui, je vais le faire !’ (rires) En fait c'est assez simple, soit les gens ont envie de participer, soit ils ne veulent pas. Pas besoin d'essayer de les convaincre ! Même pour Klaus Meine, je ne pensais pas que ce serait aussi facile. On se connaissait déjà, car Edguy a joué avec Scorpions et Rudolph Schenker avait joué sur le dernier Avantasia. Je lui ai donc simplement posé la question, il a écouté la piste et il a accepté. En fait, ils m'ont donné le sentiment, et cela me rend très fier, qu'ils voulaient vraiment faire partie de cet album. C'est plus simple que de devoir tirer quelqu'un jusqu'au studio en espérant qu'il change d'avis (rires) !

- As-tu essuyé quelques refus ? Des gens que tu aurais bien voulu avoir sur les albums ?

Oui, il y en a eu quelques-uns. Je voulais avoir Steve Lee, mais Gotthard était trop occupé avec son nouvel album et la tournée avec Europe. Cela n'a donc pas fonctionné. Je voulais aussi avoir Sebastian Bach, le gars de Skid Row, mais cela n'a également pas été possible. J'ai aussi voulu avoir à un moment un solo d'Eddie Van Halen, mais j'ai seulement réussi à contacter son photographe, je ne suis pas allé plus loin, donc ça n'a pas marché (rires).

- En parlant de tous ces guests, à quel point sont-ils libres de réarranger les parties que tu as composées pour eux ?

Cela dépend. Par exemple pour Bruce Kulick, je lui ai donné un endroit où il pouvait jouer son solo comme il le sentait. Voilà pour les instruments, et spécialement la guitare lead, ils pouvaient vraiment faire ce qu'ils voulaient, sans problème. En ce qui concerne la batterie, nous avions une vision assez claire de ce que l'on désirait. Pour les voix, je leur donnais une démo avec un enregistrement guide. Certains chanteurs trouvaient que la démo était cool et ont chanté presque la même mélodie, et d'autres ont un peu plus interprété.

- Tu ne t'es jamais dit : ‘Oh non, il est en train de tout changer !’ ?

(Rires) Non, non, non. Je me serais probablement dit ça quand j'avais vingt ans sur mon premier enregistrement, mais je n'impose plus mes idées à présent. Si tu invites de tels chanteurs, c'est parce qu'ils ont une voix caractéristique, une identité propre. Nous avons quand même Klaus Meine sur cet album ! Ce serait très arrogant et stupide de vouloir qu'il chante juste ce que tu lui dis.

- J'imagine qu'il sera très dur de faire une nouvelle tournée avec Avantasia...

Oui, pour le moment je ne pense pas que cela arrivera. Mais il ne faut jamais dire jamais ! Nous nous sommes tellement amusés lors de la dernière tournée... Et personnellement je me réjouis vraiment de refaire du live avec Edguy. Mais avec Avantasia, je ne suis pas sûr que cela soit de nouveau possible. Ce dont je suis sûr, c'est que c'est très dur au niveau de l'organisation, avec tous les agendas à faire correspondre, toute la production qui est très coûteuse... S’il y avait une possibilité, je pense qu'on la considérerait sérieusement, mais pour l'instant on ne dirait pas que cela arrivera un jour.

- Le tout premier concert d'Avantasia a eu lieu en Suisse, au Rocksound Festival en 2008. J'y étais et c'est encore maintenant un très bon souvenir. As-tu un souvenir spécial de ce premier concert ?

Oui, bien sûr ! J'étais affreusement nerveux, tu sais. Avec Edguy, nous avons une certaine routine, une routine positive. Les shows ne sont pas tous les mêmes, mais au moins tu sais plus ou moins ce qu'il va se passer, tu ne stresses pas vraiment. Avec Avantasia, je ne savais pas du tout à quoi m'attendre ! Je ne savais pas comment le public allait réagir, si nous avions préparé ce que les gens attendaient : je ne savais rien du tout. Je me souviens que vingt minutes avant de monter sur scène, je me suis dit : ‘Tu es vraiment trop con ! Comment as-tu pu te mettre dans une situation si foireuse ?!’ (rires) Mais en fait, après le concert, je me suis dit que c'était génial et que c'était vraiment une excellente idée.

www.tobiassammet.com

Jonathan

Entretien téléphonique réalisé le 7 avril 2010

mis en ligne le : 19.07.10 par graber

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