INTERVIEW - Void of Voices (2010)

Attila Csihar est un être paradoxal. Aussi terrifiant qu’accessible, aussi célèbre que modeste. Il aura suffi d’un mot de Kristoffer Rygg (Ulver) pour improviser cette interview, à la découverte de Void Of Voices, nouveau monstre imaginé par le frontman de Mayhem à découvrir en première partie de la tournée européenne d’Ulver. Avec un accent digne de Dracula, le Hongrois aux mille projets (Sunn O))), Burial Chamber Trio, Plasma Pool, …) raconte la genèse de cette curiosité musicale, où la voix détrône les instruments.




- Comment t’est venue l’idée de lancer ce projet à cent pour cent vocal ?

Il s’agit d’une vision qui remonte à longtemps, en fait. J’aimais l’idée de créer de la musique uniquement avec ma voix mais je ne voulais pas avoir recours à l’ordinateur. Depuis, j’ai entendu parler d’un nouveau type de sampler, qui me permet de tout faire en live, sans utiliser de bandes préenregistrées. Car Void Ov Voices repose avant tout sur le live. J’ai commencé il y a une année. J’ai eu la chance de me produire aux States, à Moscou, en Allemagne, en Norvège… Et me voilà avec mes amis d’Ulver, que je connais de longue date. C’est génial ! C’est un grand honneur de tourner avec eux.

- Les concerts de Void Ov Voices sont très hermétiques ; on ‘n’entre’ que très difficilement dans un tel show. Cette approche de musique peut paraître très égoïste…

Non, ça ne devrait pas fonctionner comme ça. Je pense que pour les gens, cela paraît étrange de n’entendre que de la voix, là où ils attendent des instruments. C’est un défi pour moi comme pour le public. Je suis très influencé par la musique industrielle des années huitante et certains trucs techno. J’apprécie le côté périodique des sons qui font réagir ton cerveau, comme le ferait un mantra.

- La manière dont tu utilises ta voix sur certaines parties évoque les chants des Touvas…

Oui, totalement. J’utilise ce type de chant très guttural assez similaire. Encore une fois, je pense que ma démarche va dans le même sens : celle de créer un mantra, une période. Je n’ai jamais rencontré de maître du chant Touva mais je serais enchanté d’en avoir l’occasion, pour voir comment ils s’y prennent pour chanter de la sorte.

- J’imagine que l’expérience doit être très différente de celle que tu connais avec Mayhem, dans la mesure où, sur scène, tu ne peux compter que sur toi-même. Comment le vis-tu ?

C’est intéressant. Chaque soir, il y a cette montée d’adrénaline : tous les regards sont tournés vers toi, tu ne peux pas te permettre de faire des erreurs car elles se remarquent immédiatement. Tout le show repose sur moi, alors j’essaie de m’oublier, de laisser sortir les sons. Je suis présent mais je suis aussi absent. J’envoie ma voix dans cette sorte de machine à voyager dans le temps. C’est dur de qualifier ce que je ressens. C’est une expérience, en tout cas. Comme tu le dis, ça n’a rien à voir avec un show de Mayhem où les instruments font beaucoup de bruit. C’est difficile pour moi de n’entendre que mon chant, de voir comment mes lignes interfèrent entre elles. Je n’utilise aucun effet ; ce que tu entends, c’est le son de ma voix. Mais je la passe dans une boucle et je découvre ce halo sonore que créent les différentes couches. J’ai baptisé ce projet Void Ov Voices car les voix amènent ce sentiment de vide.

- Comme tu le faisais remarquer plus tôt, Void Ov Voices fait vraiment sens en live. Penses-tu qu’enregistrer en studio représente un quelconque intérêt ?

J’ai enregistré quelques lives et je les sortirai peut-être un jour. Mais pour l’heure, je préfère que cela reste un projet live. De nos jours, tout le monde veut sortir un disque ou une démo mais je préfère le côté instantané du concert, voir comment les structures évoluent, de soir en soir. À chaque concert, le résultat est différent. La charpente est toujours la même mais elle me laisse beaucoup d’espace. Je pourrais agencer ces boucles selon un million de manières différentes.

- Ce soir, Kristoffer Rygg t’a rejoint sur scène, pour la première fois de cette tournée. Travailler avec d’autres chanteurs au sein de Void Ov Voices t’intéresse-t-il ?

Peut-être. J’apprécie les collaborations. J’ai ouvert pour Merzbow à Oslo (NdR : Derrière ce pseudonyme se cache le Japonais Masami Akita, l’un des parrains de la musique bruitiste, pour ne pas dire inécoutable). À la fin de son set, nous avons joué ensemble. C’était génial. Mais bon, ce n’était pas un chanteur. Ce soir, travailler avec Kris s’est révélé une expérience très positive et j’ai été extrêmement heureux et honoré qu’il me rejoigne sur scène. C’est l’un de mes vocalistes préférés. Pour nous deux, c’était quelque chose de nouveau. Nous n’avons pas répété. Nous avons seulement essayé quelques trucs lors du soundcheck, c’est tout. J’espère que nous pourrons remettre ça.

www.myspace.com/voidovvoices

Dave

Interview réalisée le 16 février 2010 à Bulle

mis en ligne le : 22.06.10 par graber

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