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Bruce Kulick n’est pas resté inactif depuis son départ (forcé) de Kiss en 1996. Le guitariste hyperactif vient de signer son meilleur album solo à ce jour, ‘BK3’. Un son de tueur, des compos super bien ficelées et un casting de folie. Des raisons en or pour nous entretenir avec le maestro.
- Bruce, ton troisième album solo ‘BK3’ aborde un grand nombre de styles. Était-ce un choix conscient ?
Ce type d’approche m’a toujours intéressé. Déjà à l’époque de ‘Revenge’ (1992), j’abordais de nombreux styles. À vrai dire, je n’ai rien calculé. Mon jeu de guitare est ainsi. Et puis le fait d’avoir invité autant de personnes (comme Nick et Gene Simmons, Tobias Sammet, John Corabi, Steve Lukather…) a contribué à cette diversité.
- Je suppose que retravailler avec Gene Simmons a été un grand moment d’émotion…
Absolument. Nous avons vraiment passé un bon moment. La séance studio a été filmée dans le cadre du ‘Gene Simmons Family Jewels’ (NdR : un reality show à la ‘The Osbournes’ qui met en scène Gene et sa famille). Les paroles du morceau ‘Ain’t Gonna Die’ ont été composées spontanément en studio. Tout a été mis en boîte rapidement.
- Nick, le fils de Gene a aussi apporté sa contribution sur le morceau ‘Hand Of The King’. Possède-t-il le même talent que son père ?
Nick est très talentueux mais sous d’autres aspects. Je pense qu’il possède une super voix, mais plus bluesy. C’est marrant, mais Gene a grandi avec Led Zeppelin, Hendrix, Cream et les Beatles. Nick semble intéressé par des formations encore plus anciennes qui ont influencé Led Zep et compagnie. Et puis je ne pense pas que Nick ait le même sens des affaires que son papa (rires). Il n’est pas aussi avide, si tu vois ce que je veux dire…
- C’est vraiment bizarre car un album solo est censé être très personnel, mais avec autant de guests, cela paraît difficile…
(Sourire) Cela peut paraître paradoxal mais cet album est très personnel car je l’ai composé et arrangé de A à Z. Regarde Carlos Santana qui ne cesse d’inviter des musiciens sur ses albums. Ses morceaux portent quand même sa griffe. Le fait d’inviter plusieurs personnes ne dénature pas mon travail. Au contraire, je suis persuadé que le talent de chacun a contribué à rendre mes compositions encore plus solides.
- Au début de ta carrière, tu as travaillé avec un artiste solo, Michael Bolton, qui invitait également des tas de gens sur ses albums. Est-ce qu’il t’a influencé sur ce point ?
Oui, mais au même titre que tous les projets dans lesquels je me suis impliqué, Meat Loaf, Black Jack, Kiss… Ce que j’ai pu retirer de ces expériences est cette capacité à savoir déléguer aux bonnes personnes. Je suis certain de mes capacités de compositeur et de producteur, mais je ne vais pas chanter des chansons qui ne collent pas avec ma voix. La finalité est quand même de délivrer le meilleur album possible. Comme diraient les Beatles : ‘With a little help from my friends’... (rires)
- Depuis l’album de Kiss ‘Carnival Of Souls’, on sent que ton jeu de guitare est influencé par des styles plus modernes et plus ‘dark’ comme Alice In Chains ou Soundgarden. Comment vois-tu les choses ?
Je suis d’accord, ‘Carnival Of Soul’, le dernier album de Kiss sur lequel j’ai joué, possédait un feeling plus sombre et je ne nie pas l’influence qu’Alice In Chains a pu avoir sur mon jeu. Mais encore une fois, je reste très versatile. Je suis aussi capable de pondre de superbes solos acoustiques comme sur la ballade ‘Forever’. Je sais donner à chaque morceau ce dont il a besoin.
- En 1996, est-ce que tu pressentais ce qui allait se passer, le retour du line-up original de Kiss et ton renvoi pur et simple ?
Lorsque j’ai fait le MTV Unplugged, je savais qu’Ace Frehley et Peter Criss étaient invités. Cela ne m’étonnait pas plus que ça car cette émission était un événement en soi. Le groupe fêtait ses vingt ans. Je comprenais que la soirée devait être spéciale. Mais je ne savais absolument pas qu’une tournée de reformation se profilait à l’horizon. Mais je pense qu’ils l’ont fait exactement au bon moment.
- Ne t’es-tu pas senti trahi ?
J’ai été blessé bien sûr, mais il ne faut pas oublier que c’est du business avant tout. Avec le retour du line-up original, le groupe a généré quarante millions de dollars. Un an auparavant, lorsque je faisais partie de Kiss, le groupe ne générait que quatre millions. Le calcul est vite fait. Dans cette histoire, mon talent et mes capacités en tant que guitariste n’ont jamais été remis en question. Quelque part, cela me rassure.
- Est-ce que Gene et Paul te considèrent toujours comme un membre de la famille Kiss ?
Oh oui, sans aucun doute. Je suis toujours le bienvenu en backstage, où je veux, quand je veux. Je ne pense pas que Gene aurait accepté de chanter sur mon album s’il n’avait pas de la considération pour moi. Je joue également pas mal avec Eric Singer (dans ESP), quant à Tommy Thayer, il est un excellent ami.
- Est-ce que tu t’imagines un instant dans la peau du personnage du ‘Spaceman’ ?
Non, j’ai été guitariste de Kiss pendant douze ans, mais je n’ai jamais voulu me substituer à Ace. J’ai toujours été clair sur ce point. Tout ce cirque avec le maquillage n’est pas pour moi. Si un jour ils avaient le cran de me proposer une tournée dans le trip de ‘Revenge’, j’aurais ma place parmi eux. Mais je n’attends pas après. Je ne suis pas du genre à rester chez moi à attendre que le téléphone sonne.
- Quelles relations entretiens-tu avec ton frère Bob ?
Nous travaillons énormément ensemble, ne serait-ce que sur de nombreux albums tribute dont il est le producteur. Nous sommes très proches.
- Quelle satisfaction tires-tu de ces participations à des albums hommage ?
Le plaisir de jouer pour le fun dans un environnement propice avec un max d’équipement. C’est Bob qui se charge de la distribution des rôles. Il choisit le track listing et évalue quel musicien de l’équipe a le jeu le plus adapté. Mais il lui arrive de ne trouver personne pour assurer un morceau. Alors, il se tourne systématiquement vers moi en me disant : ‘Tu me feras ça. Prends-le comme un challenge’. En dehors de l’aspect musical, ce type d’expérience renforce notre relation.
- Tu as récemment sorti une vidéo éducative avec Bob. Quel message veux-tu faire passer à la nouvelle génération ?
Tu fais référence au DVD ‘Kiss Forever’… J’y présente les morceaux de Kiss auxquels j’ai participé. Je montre en détail comment je les joue, comment j’obtiens tel son avec quelle pédale… J’adore enseigner. C’était d’ailleurs mon activité principale avant que la musique ne prenne tout mon temps. Ce DVD m’a permis de retrouver de vieilles sensations…
- Bob a joué à maintes reprises sur des albums de Kiss (entre autres les quatre inédits de la compilation ‘Killers’ de 1982). Mais il n’a jamais été crédité. Pourquoi Kiss ne mentionne jamais ses invités ?
C’est une attitude que je peux comprendre. Kiss doit être considéré comme une entité composée de quatre personnes, même si le groupe reçoit une aide extérieure. Il est arrivé la même chose aux Beatles. Effectivement, mon frère a souvent remplacé Ace au pied levé lorsque celui-ci se montrait incapable d’assurer. Je ne sais pas si j’aurais été capable de jouer les remplaçants de l’ombre, mais Bob a accepté cet état de fait et il a pris sur lui. Tu sais, l’histoire entre Kiss et Bob ne date pas d’hier. Mon frère a auditionné pour le groupe le même jour qu’Ace, en 1973 !
- Te souviens-tu de ton arrivée dans Kiss ?
Bien sûr, comme tu peux t’en douter, j’ai été recommandé par Bob. Gene et Paul l’auraient bien pris pour remplacer Vinnie Vincent en 1984, mais il était bien trop connu en tant qu’artiste de session, et puis surtout en tant que chauve. Il fallait trouver du sans neuf. C’est là où j’ai saisi ma chance. Au début, je pensais que ce n’était que pour un remplacement de deux mois, le temps que Marc St John se remette de ses problèmes aux mains. Jamais je n’aurais pensé que cela durerait douze ans !
- Tu joues depuis neuf ans avec une autre légende, Grandfunk Railroad. Ne rêves-tu pas d’enregistrer un vrai album studio avec eux ?
Nous avons déjà inclus de nouvelles compos dans notre setlist et ces morceaux figurent sur des DVDs officiels. Mais si un nouvel album est envisagé, ils savent qu’ils peuvent compter sur moi. Je suis déjà heureux de partager la scène avec de tels musiciens, sans compter que le public devient dingue à chaque prestation. Je suis vraiment comblé.
- Est-ce que tu comptes tourner pour la promo de ‘BK3’ ?
Ce n’est pas prévu. Monter un groupe de scène est un peu compliqué en ce moment. Par contre je suis en train de conclure quelques contrats avec de grandes marques de matériel comme ESP et Marshall afin de me produire en ‘clinics’. De plus, Grandfunk me prend énormément de temps. La seule chance que vous aurez d’écouter quelques morceaux de ‘BK3’ en live serait de retourner avec le ‘Eric Singer Project’. Peut-être un jour ?
http://www.kulick.net/
Laurent Divergent
Entretien téléphonique réalisé le 21 janvier 2010
mis en ligne le : 16.05.10 par indy
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